22 Mai 2025 | Actualités

Laurent Abergel : “Le vivre et le faire vivre avec le FC Lorient”

Laurent Abergel, le capitaine emblématique des Merlus, est revenu sur la magnifique issue de cette saison qui restera mémorable pour bon nombre de Lorientais. Lui le premier. Entretien.

Laurent, es-tu redescendu de ton nuage ?
Oui, un petit peu. On arrive dans un moment où tu réalises et où tu prends un peu de recul. On se retrouve chacun dans son coin et on réalise petit à petit que l’objectif est atteint, que le titre est acquis. La saison a été pleine et aboutie.

Y a-t-il un contrecoup de fatigue, émotionnel qui arrive maintenant ?
Oui, mais on se sent super bien. Sans le vouloir, on compare les débuts de vacances de l’an passé et celui-ci. L’état d’esprit n’est pas le même. On a de la chance d’avoir vécu de bons moments cette saison. Ils peuvent être rares dans une carrière. Au détail près, tout était parfait. Maintenant, on redescend, on apprécie mais il y a une fatigue qui rentre en compte à cause de la pression. C’était une guerre des nerfs et quand elle est terminée, la fatigue arrive.

Comment as-tu vécu ce dernier match, cette dernière soirée au Moustoir ?
Le meilleur moment de la soirée, c’est quand on met le 3-1, le 4-1… A ce moment-là, sur le terrain, je me suis demandé quand j’allais récupérer le brassard de champions. Il y avait peut-être moins d’émotions que lors du match face à Caen mais j’ai réalisé qu’il fallait savourer les instants présents. Des regards se croisaient entre nous sur la pelouse. Je me rappelle avoir regardé « Monta » et rien qu’avec cela, on s’est dit qu’on l’avait fait. Tous ces regards, c’était un kiff. Du 3-1 jusqu’au moment où on soulève le trophée, j’ai vécu des moments dingues.

Il n’y avait pas besoin de mots…
Exactement, je me rappelle m’être retourné vers Monta et de ne pas avoir parlé. On s’est regardé, on a rigolé, et on n’a rien ajouté. Ça voulait tout dire. C’est l’apothéose, c’est la fin. On s’est remercié dans ce regard aussi. On a tout donné les uns pour les autres. Je parle pour tout le monde. Se féliciter entre nous, c’est beau ! Quand ce n’est pas bien fait, il faut l’assumer et le dire. Quand c’est bien fait, il faut se le dire et en profiter.

“Une part d’imprévue lors du match face à Caen”

Quels sentiments ont prédominé au coup de sifflet final ?
Beaucoup de plaisir et de soulagement. La mission est finie et accomplie. Le travail a payé et maintenant, il faut savourer. Mais je dirais surtout le soulagement. Il n’y avait plus d’échéances à venir sur cette saison, il n’y avait plus qu’à soulever le trophée. Beaucoup de soulagement car la pression était énorme. De la fierté du devoir accompli également. C’est une fierté de rendre heureux tout le monde : nos familles, le club, les supporters…Le sport et le foot t’apportent ce style d’émotions. La fierté prédomine.

La soirée face à Caen, celle face à Martigues. Quelle est pour toi la plus mythique ?
Je dirais celle de Caen car il y a une part d’imprévu, de surprise… Le scénario te fait comprendre que quelque chose se passe. Face à Caen, c’était aussi notre objectif. Quand il a été atteint, et dans ce scénario, l’émotion se contrôle plus difficilement, ce n’était pas préparé. Tous les nerfs lâchent. C’était tellement fou et tellement bon. Face à Martigues, on avait préparé les choses autrement. Contre Caen, on était plus dans l’émotion.

Ce sont les plus beaux souvenirs de ta carrière ?
Bien sûr. Je suis content de les avoir faits ici. Je les avais rêvés, idéalement sans ce passage en Ligue 2. Mais c’est notre histoire, il faut savoir l’accepter. Grâce à cette saison, il y a moins de regrets. C’est le meilleur moment collectif de ma carrière.

“Nous sommes liés à vie”

Que représente pour toi ce titre de champion de France de Ligue 2 ?
De la fierté. La fierté de finir premier, la fierté de marquer l’histoire du club, la fierté de le faire avec ce groupe. On parle de collectif, le groupe a toujours tiré dans la même direction, a fait les choses ensemble, personne n’a pensé à lui. On se rappellera de ce titre, de cette saison. Cette équipe est gravée dans le marbre. On a chacun notre médaille, on a le trophée. C’est encore plus significatif que de monter sans le titre. Ça montre aussi que cette équipe avait de la qualité et qu’elle a tout donné sur le terrain pour le faire. Ça n’a pas été facile. Meilleure attaque, meilleure défense, ça veut dire beaucoup…Des individualités ont fait la différence mais c’est surtout le collectif qui a dominé, à l’image de nos finisseurs. L’histoire de ceux qui ne débutent pas les matches est très belle. C’est très marquant. C’est l’histoire de tout le monde, tout le monde a été impliqué et a eu son moment. C’est l’image de la saison.

Aujourd’hui, vous êtes liés à vie grâce à ce titre…
On est lié à vie. On a créé des choses extraordinaires. On s’est souviendra longtemps. Ça renforce les liens, les souvenirs. Je vis la même chose avec ce groupe qu’en 2019-2020. Ça relie tout le monde : les supporters avec ce groupe, le club… Personne ne pourra nous l’enlever.


On te sait très attaché au FC Lorient. La joie du titre est-elle décuplée dans ces conditions ?
Oui, je voulais absolument le vivre et le faire vivre avec Lorient. Je ne le contrôle pas. Julien Laporte est dans le même cas que moi. On a vécu des moments difficiles où il fallait se serrer les coudes, c’était moins kiffant. De voir que d’autres clubs l’avaient fait avant nous, nous a poussé à le faire ici et le faire vivre. J’ai souvent entendu autour de moi : « Quand est-ce que cela va arriver à Lorient : les envahissements de terrain, ces émotions… ? ». Le fait de l’avoir réalisé, c’est encore plus beau. On l’a fait ! J’espère que le meilleur est devant nous maintenant. D’avoir vu cette ville et ce stade en état de grâce, c’était magnifique. Chez nous aussi on a le droit de vivre ces moments. J’en rêvais de le faire à Lorient. Voir ce stade dans un état second contre Caen, en orange à Guingamp et face à Martigues, ça nous a interpellés. Comment ça se fait que ce n’est pas tout le temps comme ça ! Il faut faire une propagande à chaque match pour revivre ça (rires). Les images sont énormes avec ce soleil…Tout était réuni pour faire la fête. Les images sont très marquantes. 

Est-ce une fierté pour toi d’être le capitaine de cette équipe ?
Je le disais à mes proches avant le match : en tant que capitaine, soulever un trophée, ça ne se passe pas tous les jours. Ça peut ne jamais arriver. C’était un kiff, une fierté…J’ai voulu le vivre avec Ju’ Laporte. Dans ma tête, c’était d’une logique totale. On se l’était dit en début de saison : si jamais cela doit arriver, on le fera et on le vivra ensemble. L’image est forte. Au-delà du capitaine, il y a des vice-capitaines, des cadres…C’est un travail de chacun. D’avoir revu cette image, je voulais la vivre et la garder. C’était magnifique. J’espère qu’on aura l’occasion d’en soulever d’autres. Mais ce ne sera pas facile. J’espère qu’on va rester ancrer en Ligue 1 aujourd’hui et aller chercher un titre national, ce serait magnifique.

Les différents brassards t-ont-ils donné une force supplémentaire ?
Quand on parle de fierté, on y est en plein dedans. On passe par l’histoire du territoire, celle du club…ça m’a apporté une force supplémentaire. Celui que je portais à l’extérieur n’était peut-être pas le plus beau mais la symbolique est belle avec le visage des supporters. Il y a une recherche derrière et ça t’apporte de la force. Celui donné par ma famille samedi dernier, par surprise, m’a apporté un supplément d’âme, j’étais dominé par une force en plus.

“Une force collective s’est vite dégagée”

Avais-tu senti dès l’été dernier que quelque chose pouvait se passer ?
Oui. Après la validation du coach et du staff, je savais que l’on pouvait bien vivre ensemble. Et c’est ce qui s’est passé. Ils ont été dès le début très cohérents dans ce qu’ils ont proposé, justes dans leurs choix, mis le collectif en avant. Tout cela te fait comprendre que tu es dans une année où personne ne se prendra pour un autre. Et on va travailler. Tout le monde peut performer dans ces conditions. Ensuite, voir certains joueurs rester au club te donne une force supplémentaire. C’était à nous de décider de notre saison en quelque sorte. Si tout le monde met du sien et est performant, normalement ça va aller. Mais il faut bien débuter, faire une bonne préparation. Ça rassure de voir un staff qui connaît ce championnat, qui est fort, avec un groupe solide. Ce n’est pas facile à faire. D’autres équipes avaient peut-être un meilleur groupe que nous mais n’ont pas réussi à le faire. Ce n’est jamais acquis. Tu y crois un peu plus quand tu sais sur qui compter.

Le fait que l’objectif de remonter immédiatement ait été affiché clairement vous a mis dans le bain dès la préparation d’avant saison ?
Je pensais que ça allait nous mettre plus de pression que cela. On l’a assumé. Et avec cet effectif, nous n’avions pas trop le choix. Franchement, avec ce coach, ce staff, cet effectif, c’était dur à faire mais tu ne peux pas te cacher. On se serait mentis à nous-mêmes. Si on avait annoncé un autre objectif, nous n’aurions pas été cohérents. Malgré tout, il faut le faire et garder de l’humilité. Se remettre en question tous les week-ends. Si on est descendu, c’est qu’on le méritait. On est reparti au travail, on ne s’est jamais enflammé. Il a fallu prendre la mesure de ce championnat difficile qui progresse chaque année.

Une force collective s’est-elle vite dégagée de ce groupe ?
Oui, je trouve. Dès la préparation, on l’a sentie. A la reprise, le sentiment était particulier car il restait beaucoup de joueurs de la saison dernière. Le club a fait ce qu’il fallait. Le groupe était très large. Mais ça l’a fait car les choix ont toujours été justes. Dès le début, on a senti qu’on pouvait le faire.

Peut-on parler d’une équipe de copains ?
Bien sûr, c’est une équipe de copains. Pour monter, c’est cet état d’esprit qu’il faut avoir. Mais ce n’est jamais évident à faire. Même si on se connaissait pas mal, le groupe était quand même touché à la reprise de l’été dernier. Il a fallu effacer tout ça, le staff a été top, il a fallu réapprendre à se faire mal… On a repris les bases, on a remis tout à plat et on est allé au charbon tous ensemble. C’est une équipe qui a aimé vivre ensemble, sur et en-dehors du terrain. C’est une année top.

“Dunkerque, le tournant majeur”

As-tu senti un léger doute dans la saison ?
Il y a eu des doutes. On a eu une période difficile après Cannes. On perd à Laval, le match nul à domicile face à Metz, on sent qu’ils sont meilleurs que nous à ce moment-là. Et ensuite on va à Dunkerque. Avant d’aller chez eux, on se fait peur. On se demande si on allait reprendre le fil… Il y a cet enchaînement qui fait douter. On n’est pas au top et on veut vite passer à autre chose. Le tournant majeur c’est la victoire à Dunkerque. En plus, je le vis de l’extérieur avec beaucoup de pression puisqu’on n’était pas très performant loin de nos bases. En perdant, on passait du mauvais côté, en l’emportant, on réenclenchait une dynamique. Ça a tout changé.

17 buteurs différents. Qu’est-ce que cela signifie ?
Quand on se lâche, on a un jeu qui va vers l’avant, avec un beau collectif qui fait ce qu’il faut. On a beaucoup le ballon, du coup tu es en permanence dans le camp adverse. Même moi, je n’ai jamais eu de statistiques comme ça, notamment en termes de passes décisives. Chacun a performé. On a souvent pris l’ascendant en seconde période, en mode « rouleau compresseur », et on a su se procurer beaucoup d’occasions.

Tu as dépassé les 200 matches sous le maillot des Merlus cette saison. Jusqu’où souhaites-tu aller ?
C’est une fierté. Plus ça avance, plus ça devient un objectif de monter le plus haut possible. Je veux performer et être régulier pour le faire. A chaque fois que je passe un joueur, j’en suis fier parce que ce sont des joueurs qui ont marqué le club.

As-tu un message à adresser au public du stade du Moustoir ?
Ils peuvent être tous fiers d’eux car ils ont été présents, ont accepté la situation, car ça n’a pas été facile pour eux. Ils ne nous ont pas lâché et n’ont jamais montré d’énervement suite à la descente. On a tous compris qu’il fallait le faire ensemble. Ils peuvent être fiers de se sentir supporters et c’est aussi grâce à eux que ce projet de remontée a été acquis. Et bien évidemment, un énorme merci d’être ce qu’ils sont, d’avoir montré leur amour pour le club. Cela a été une force énorme pour nous. Si on a autant performé au stade du Moustoir, ils en sont pour quelque chose. De notre côté, on a essayé de leur rendre de la meilleure des manières.

Partager sur : Facebook | X